Description
Une forêt se caractérise par les espèces d’arbres qui composent la strate arborescente, et par celles qui poussent en sous-bois.
Les différents types de forêts naturelles (non plantées) sont réparties sur le territoire en fonction du sol et du climat, chaque espèce ayant des exigences écologiques propres de plus ou moins grande amplitude.
Le hêtre préfère les climats frais avec une humidité atmosphérique importante. Il est donc naturellement plus fréquent dans le nord, l’est de la France et en montagne. En Nouvelle-Aquitaine, il est assez abondant du piémont jusqu’à l’étage montagnard des Pyrénées, ainsi que dans les contreforts du Massif central. En raison du climat plus chaud et plus sec dans les plaines de la région, les boisements de hêtres y sont beaucoup plus rares, particulièrement originales mais aussi vulnérables.
Elles sont présentes exclusivement dans des secteurs où les conditions microclimatiques sont les plus fraîches, souvent sur les versants ombragés des vallons encaissés en bord de rivières. Ce sont des reliques de la dernière glaciation. L’INRAe a daté la hêtraie du Ciron : elle est âgée de 40 000 ans !
On y trouve de nombreuses espèces végétales formant un cortège atypique dans le contexte régional. Le chêne sessile, lui aussi peu fréquent en Nouvelle-Aquitaine, est souvent associé au hêtre ; à l’inverse du chêne pédonculé qui domine la plupart de nos forêts de feuillus. La laîche digitée ou le muguet, qui se réfugient dans l’ambiance fraîche des hêtraies, sont d’autres espèces présentant une sensibilité certaine à des modifications thermique et hygrométrique du climat régional.
Effets possibles du changement climatique
Les microclimats frais, où ces forêts trouvent refuge, sont extrêmement sensibles à toute modification environnementale. Quel sera l’impact des évolutions climatiques sur la composition floristique des hêtraies et sur la survie de ces forêts en plaine ?
Suivis scientifiques
En Nouvelle-Aquitaine
Le CBN Sud-Atlantique, en partenariat avec l’Université de Bordeaux, va suivre la composition et la structure des communautés végétales. Ce suivi s’opérera par la mise en place de placettes permanentes dans différents secteurs de la région, au sein desquelles des inventaires floristiques fins seront réalisés de façon régulière. En parallèle, une étude des communautés végétales est menée afin de connaître l’aire de répartition des différentes communautés ainsi que leur composition floristique.
La vidéo suivante présente le protocole de suivi des hêtraies, mais aussi les effets possibles du changement climatique.
Description de la vidéo
Derrière un arbre, se cache parfois une forêt surprenante. En Nouvelle-Aquitaine, des forêts typiques des climats boréo-montagnards se retrouvent en plaine. Ces poches de fraîcheur sont alors dominées par un arbre fréquent dans les Pyrénées : le Hêtre.
Ces forêts reliques sont parcourues de long en large par Kévin Romeyer, botaniste au CBNSA. Le long de plusieurs bandes de 100 m², il inventorie le moindre végétal présent. Son but : suivre l’évolution de la structure des sous-bois dans ces reliquats de forêt.
Intervention de Kévin Romeyer : « Le chèvrefeuille des bois ici. On a le lierre… La petite pervenche avec ses feuilles coriaces… Là, on a la grande lusule, bordée de poils et c’est une espèce d’affinité montagnarde. On la trouve beaucoup plus dans le nord de la France et en montagne. Elle est donc assez relictuelle et on la retrouve souvent dans les forêts à hêtres. »
Le hêtre… Comme tout un cortège de plantes adaptées, il a besoin d’un climat frais avec une humidité atmosphérique importante. Mais il est également dépendant d’un autre facteur essentiel : le sol. En parallèle du suivi floristique, Kévin et son équipe vont procéder à des carottages. Les carottes seront analysées au laboratoire par Emmanuel Corcket de l’Université de Bordeaux.
Intervention de Emmanuel Corcket : « Donc là c’est un horizon organo-minéral. C’est une très belle structure grumeleuse. Ce qu’on va mettre en évidence, c’est le gradient de couleur. En haut du profil, on a des sols qui sont très limoneux. Puis, lorsqu’on arrive vers le bas, les sols sont beaucoup plus argileux, voire même très très argileux au fond, ce qui traduit une capacité à retenir l’eau. La distribution du hêtre, qui est sensible aux changements climatiques, dépend du climat local bien sûr, mais énormément des types de sols. Il y a donc des zones de persistance du hêtre qui sont uniquement liées à la nature du sol malgré le fait que le climat lui soit relativement défavorable. »
Qu’adviendra-t-il de ces hêtraies de plaine dans le Sud-Ouest de la France ? Sauront-elles se maintenir grâce au type de sol dans lequel elles poussent ? Ou est-ce que celui-ci sera aussi impacté par le changement climatique ?
Tant de questions en suspens auxquelles les chercheurs, têtes dans les feuillages ou absorbés dans leurs laboratoires se posent déjà.
Vous pouvez aussi découvrir ce protocole en bande dessinée :